Fofana: Alliot-Marie souhaite un appel du parquet

Elle a demandé au parquet de "faire appel des condamnations inférieures aux réquisitions de l'avocat général"
Des mouvements juifs, dont le Crif, ont appelé à manifester lundi soir pour réclamer un nouveau procès et dénoncer les peines prononcées vendredi contre des complices de Youssouf Fofana, principal accusé du meurtre d'Ilan Halimi en 2006.

L'Union syndicale des magistrats (USM) juge "inquiétant" que la garde des Sceaux ait demandé un nouveau procès.

Fofana, le chef du "gang des barbares", a été condamné à la peine maximale, la prison à perpétuité pour l'assassinat du jeune Ilan Halimi en février 2006.

La jeune fille qui a servi d'"appât" pour attirer Ilan Halimi dans un guet-apens a été condamnée à 9 ans de prison et bénéficié de l'excuse de minorité alors que le parquet demandait 10 à 12 ans de prison. Les lieutenants de Youssouf Fofana, Samir Ait Abdelmalek et Jean-Christophe Sombou, ont respectivement été condamnés à 15 et 18 ans de réclusion alors que 20 ans étaient requis. Le futur procès en appel devrait concerner les complices de Fofana.

En réclamant un appel du parquet, Michèle Alliot-Marie a contredit l'avocat général Philippe Bilger, qui a défendu le verdict dès samedi dans un entretien à Reuters en le jugeant "exemplaire", même si ses réquisitions n'ont pas été suivies à la lettre par les magistrats et le jury populaire.

"En fait, je ne vois pas en quoi la peine est exemplaire", a répliqué lundi sur Europe 1 la mère du jeune homme assassiné, Ruth Halimi. "L'avocat général Bilger a dit qu'il y avait deux sortes l'antisémitisme - un antisémitisme violent et un antisémitisme de base, banal. Or un antisémitisme est par définition toujours violent", a-t-elle souligné.

L'USM "s'inquiète"
Joint par l'AFP, le président de l'Union syndicale des magistrats Christophe Régnard a jugé lundi "inquiétante" la décision de la garde des Sceaux de demander un nouveau procès pour les complices de Fofana. Il a aussi invoqué le risque d'un second procès "tronqué" en l'absence de l'accusé principal, non concerné par l'appel souhaité. "Quel sens cela va-t'il avoir de faire un procès dans ces conditions là, sans Fofana ni un certain nombre d'autres ? (...) C'est assez dangereux et inquiétant pour l'avenir (...) Si la simple motivation c'est que les peines prononcées sont inférieures de quelques années à ce qui a été requis, il va falloir faire appel dans les trois quarts des affaires pénales de cours d'assises", a ajouté le président de l'USM.

"C'est la politique qui a repris ses droits sur la justice, je trouve ça assez triste (...) L'équilibre (entre parties civiles et défense) est en train d'être rompu. On est passé dans un système où la partie civile peut potentiellement exercer une sorte de vengeance privée", a-t-il encore déclaré.

Les organisations juives insatisfaites
Des organisations juives dont le CRIF ont jugé les peines des complices de Youssouf Fofana trop clémentes. L'Union des étudiants juifs s'est dite également choquée par le verdict, jugeant que tout a été mis en oeuvre pour "éviter de tirer les leçons" d'un meurtre antisémite en imposant le huis clos. Le Bureau national de vigilance contre l'antisémitisme (BNVCA) a appelé à manifester lundi soir place Vendôme à Paris pour réclamer un appel du parquet général.

Dans un entretien accordé au "Parisien", Ruth Halimi, la mère du jeune homme assassiné, souligne que l'antisémitisme n'est pas un fait divers. "Je voudrais qu'on remette les pendules à l'heure. Je le répète, ceux qui ont aidé à massacrer Ilan doivent être sévèrement sanctionnés."

Pour le BNVCA, ce verdict "est de nature à banaliser plus encore l'antisémiisme subi par les juifs depuis déjà 10 ans (...) La médiocrité des peines prononcées va de toute évidence conférer à Fofana et ses complices un statut de héros auprès des antijuifs des cités."